De plus en plus de Français sont contraints de se tourner vers leurs parents proches pour faire face à leurs dépenses du quotidien : vacances, garde d’enfants et même repas, et si la crise rapprochait les familles ?
Depuis 2005, en France, un citadin sur dix quitte définitivement le monde urbain pour aller respirer l’air de la campagne, à la recherche du mieux-vivre. Mais cet exode vers le monde rural pose un problème en matière d’accès aux soins. En effet, on constate une pénurie de médecin dans nos villages. Pour faire face, on fait appel à des Docteurs « House » des pays de l’Est.
Depuis 1983, le nombre maximum de diplômés en médecine, a été régulièrement abaissé. Cette mesure, dictée par un déficit énorme de la Sécurité sociale qui atteint cette année près de 20 milliards d’euros selon la Commission des Comptes, a créé un déséquilibre sans précédent : jeunes diplômés moins nombreux que leurs confrères partant à la retraite. Selon l’INSEE, d'ici à 2025, on accusera une baisse de près de 9,4 % du nombre de médecins sur toute la France. Ce sont surtout les médecins généralistes qui subissent de plein fouet cette pénurie, pour deux raisons : la plupart des jeunes fraichement diplômés se spécialisent et ceux qui néanmoins optent pour la médecine générale rechignent à travailler à la campagne. Devant ce délaissement, les maires de certains villages français ont décidé de faire appel à une « main d’œuvre » des pays de l’Est.
Recherche, médecins désespérément :
Voilà la devise de certains maires de nos campagnes, et pour trouver la « perle rare », ils sont prêts à consentir des efforts financiers. En effet, ils font appel à des cabinets de recrutement spécialisés comme l’Arime ou Revitalis conseil, qui facturent entre 40 et 60 000 euros la signature d’un contrat. En général, les mairies proposent un « package » aux praticiens intéressés : prise en charge du loyer pendant quelques mois du cabinet et du loyer. Et cerise sur le gâteau, les heureux élus ne déboursent rien de leurs poches. Devant cette offre alléchante, très peu restent insensibles, et pour cause. En moyenne, les médecins généralistes en Roumanie ou en Pologne ont un revenu mensuel qui n’excède pas 500 euros, alors qu’en France, ils peuvent percevoir au minimum 2000 euros. C’est l’Eldorado.
Aujourd’hui, selon le Conseil national de l’Ordre, il y a en France près de 8 500 médecins étrangers, plus de la moitié sont européens, pour l’essentiel des pays frontaliers. Mais depuis le 1ᵉʳ janvier 2007, date d’adhésion de la Roumanie et et de la Bulgarie à l’Union Européenne, 1100 médecins roumains et bulgares se sont inscrits au Tableau de l’Ordre. Face à ces chiffres, les maires des campagnes désertés ne peuvent que se réjouir. Mais pour autant, l’arrivée du médecin issue des pays de l’Est soulève quelques interrogations : exode des blouses blanches, reconnaissance et conformité des diplômes, problème d’adaptation…, etc.
Malgré tout, il faut avouer qu’il n’y a pas d’autres solutions alternatives, le retour à la campagne n’est pas à l’ordre du jour et même si certains jeunes diplômés sont prêts à faire le grand saut « la médecine moderne est devenue une activité commerciale comme une autre, affirme David, étudiant en 5ème de médecine, nous n’avons plus à faire à une patientèle, mais à une clientèle. Lorsqu’un jeune médecin achète un cabinet, c’est avant tout un investissement financier, il doit nécessairement analyser la zone de chalandise, vérifier que son activité sera bénéficiaire à terme, faire une étude de marché. Le métier a évolué. Ils évident donc que beaucoup d’entre nous refusent d’exercer à la campagne ou même dans certains quartiers. Pour ma part, il est vrai que je déteste la ville, j’ai toujours vécu à la campagne, et je suis monté à Paris seulement pour étudier. Mais dès l’obtention de mon diplôme, je me sauve. Je rêve d’être réveiller par le chant du coq le matin, manger des légumes de mon potager. Je sais que je perdrai en termes de pouvoir d’achat, mais heureux, car en harmonie avec mes convictions écologiques ».
Après le plombier polonais, voici donc le médecin roumain, c’est Monsieur Bolkestein qui doit se réjouir. Rappelez-vous, Fritz Bolkestein est le commissaire européen qui défraya la chronique en 2005 en rapportant une directive européenne visant à libéraliser les services. À l’époque, beaucoup d’européens de « la vielle Europe » ont critiqué ce projet, car selon eux, il instituait une concurrence déloyale et un nivellement des salaires par le bas.
Force est de constater, que l’arrivée de praticiens des pays de l’Est ne provoque pas la même polémique, puisque ces derniers sont perçus comme des sauveurs et qu’ils occupent des postes délaissés. La « nouvelle Europe » au secours de la « vieille Europe », c’est l’Europe du pire pour certains et du meilleur pour les autres.