Combien coûte un accouchement ?

Certes, un accouchement est gratuit en théorie. Mais dans la pratique, le coût peut faire exploser un budget. Par Mélanie Fevre.

Guillaume Duval

Rédacteur en chef d’Alternatives économiques.

Olivier Ferrand

Président et fondateur de Terra nova.

La garden-party de l’Élysée devait-elle être supprimée ? Pour quelles raisons ?

Guillaume Duval : C’est un geste qui n’a pas une portée financière mais symbolique. Dans le contexte actuel, où le gouvernement entend imposer une austérité y compris sur des dépenses qui sont utiles aux plus pauvres, il aurait été de mauvais ton de la maintenir.
Olivier Ferrand : On s’en moque. Je ne pense pas que ce soit important pour les Français. Historiquement, la garden-party représente le moment où le président rencontre un panel représentatif des Français, qu’on fait « monter à l’Élysée ».

Le coût de la garden-party (732 826 euros en 2009) représente-t-il une réelle économie ?

G. D. : Toutes les dépenses publiques sont réinjectées dans l’économie, mais certaines dépenses ont des portées économiques plus ou moins utiles à moyen terme, en particulier celles qui ont des fonctions d’investissement et permettent une croissance économique plus forte. En l’occurrence, la garden-party de l’Élysée n’était pas une dépense très sûre.
O. F. : Il n’y a évidemment aucun intérêt économique. Mais ce n’était pas conçu comme ça. Bien évidemment, le président n’espérait pas réduire le déficit de l’État en annulant la garden-party. C’est par définition une mesure symbolique, même s’il ne s’agit pas d’un vrai symbole.

L’annulation de la garden-party de l’Élysée et les mesures envisagées pour réduire le train de vie de l’État et des ministres symbolisent-elles selon vous un changement profond ?

G. D. : Dans l’immédiat, c’est plus de la communication qu’autre chose. S’il s’avérait que, comme dans les pays scandinaves, la tête de l’État s’imposait durablement de payer ses loyers et ses dépenses courantes, ce serait un changement profond pour la République française, qui a hérité d’une vision très monarchique et très nobiliaire des fonctions au sein de l’État.
O. F. : Pour la garden-party, il ne s’agit pas d’un symbole. Le train de vie de l’État n’est pas jugé là-dessus. Ce n’est pas un élément symbolique de rigueur de l’État. En revanche, le refus d’utiliser des jets privés à des tarifs prohibitifs serait un symbole bien plus fort.

Que pensez-vous de l’expression de « rilance » employée par Christine Lagarde : est-ce la solution pour relancer l’économie ?

G. D. : L’expression est sympathique, mais la réalité qui se cache derrière me paraît très problématique. Pour l’instant, le gouvernement a décidé de limiter les dépenses publiques à hauteur de 100 milliards d’euros en l’espace de trois ans. Mais les mesures prises, si elles peuvent peut-être contribuer à limiter les déficits à court terme, ne préparent pas du tout l’avenir, dans la mesure où sont touchées l’Éducation nationale et les politiques d’emploi, de logement et d’environnement, sur lesquelles la France avait déjà un gros retard.
O. F. : Ce que propose le gouvernement à ce stade, ce sont uniquement ces mesures symboliques. Il n’y a plus grand chose à gratter sur le train de vie de l’État. De même, avec la RGPP*, si vous ôtez la suppression des fonctionnaires (qui se fait de manière aveugle et ne permet pas d’atteindre l’objectif de 45 milliards d’euros d’économies sur le train de vie de l’État), il ne reste pas grand chose. Pour faire des économies réelles, il faut sortir des mesures de train de vie, et plus globalement de gestion administrative des politiques publiques.

Quelles mesures et quelle politique faudrait-il selon vous adopter pour relancer l’économie et annuler la dette publique ?

G. D. : La dérive des finances publiques est due au caractère massif de la baisse d’impôt consentie à droite comme à gauche. Cette politique, à laquelle s’est ajouté le paquet fiscal, est responsable du trou (20 points de dette publique) qui s’est creusé dans les finances publiques : c’est là-dessus qu’il faut revenir en priorité. D’une part parce qu’elle est injuste, mais aussi parce que ce serait plus efficace économiquement. Si on taxe les plus riches, ils puiseront dans leur épargne. Épargne qui est trop importante : les Français épargnent en moyenne 16 % de leur revenu par année.
O. F. : Il faut faire des choix dans les politiques publiques elles-mêmes, avec un souci de justice sociale. Par exemple, transférer une partie des sommes que représentent les baisses de charges sur les bas salaires (35 milliards d’euros) vers la création des emplois de demain. D’autre part, on a en France 600 milliards de dépenses de la Sécurité sociale. En période de crise, il faut baisser un peu son plafond et introduire une dose de redistributivité dans un système qui est pour l’essentiel assurantiel. En le baissant de 5 %, on économiserait 30 milliards d’euros.

* révision générale des politiques publiques

Juliette Speranza

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